Articles Tagués ‘justice’

L’affaire Carlo Giuliani est officiellement close depuis le 24 mars 2011. Ce jeune manifestant italien est mort il y a dix ans, le 20 juillet 2001, lors des affrontements entre altermondialistes et police antiémeute italienne en marge du triste sommet du G8 de Gênes — quelques jours après que Berlusconi ne revienne au pouvoir. La Cour européenne des Droits de l’homme (CEDH), après un premier verdict plutôt favorable à la victime en 2009, vient au contraire de donner raison aux robocops italiens.

Mais cet arrêt du 24 mars a été contesté au sein même de la CEDH. Pas moins de trois «opinions partiellement dissidentes» (c’est le terme juridique) ont été émises le même jour. Ces trois avis minoritaires affirment au contraire que l’Italie a bien violé l’article 2 de la Convention (dit « droit à la vie »), en n’ayant pas suffisamment respecté les procédures pour éviter la mort du jeune manifestant. Sans parler du fait que la jeep d’où est parti le coup de feu a ensuite roulé allègrement sur le corps du jeune activiste.

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Le principe de rétention des données électroniques vient à nouveau de s’effriter en Europe. Après l’Allemagne, la Roumanie et la Bulgarie, c’est la Cour constitutionnelle tchèque qui vient de censurer sa loi sur les télécoms ayant transposé une directive européenne de 2006. Celle qui exige des opérateurs qu’ils conservent pendant au moins six mois les données de connexion de tous les citoyens sans exception, « des fois que »… Données pouvant dresser un profil inquisiteur de chaque personne, de ses intérêts, relations, opinions… Comme par hasard, parmi les pays qui ont initié des recours juridiques contre cette directive scélérate, tous sont des pays qui ont déjà testé ce type de « surveillance préventive », inhérente aux « démocraties populaires » et de leurs polices politiques. Il y a en effet comme un air de Securitate ou de Stasi qui plane dans l’air de cette directive. En Tchécoslovaquie, on l’appelait la StB (Státní Bezpečnost – sécurité d’Etat), traduction littérale de Staatssicherheit (Stasi). »[…]

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Le CC en 2008

Difficile, dans un premier temps, de ne pas savourer la décision du 11 mars du Conseil constitutionnel sur la LOPPSI-2. Une douzaine de dispositions se sont vues censurées. Les « Sages », comme il est convenu de les appeler, ont d’abord recalé 8 mesures parmi celles suggérées  par les parlementaires d’opposition, mais se sont aussi « auto-saisis » sur 5 autres dispositions qu’ils ont aussi censuré.

En vérité, cette décision ressemble plutôt à un gros compromis. Le Conseil constitutionnel, qu’il le veuille ou non, est un organe politique. Ses choix relèvent d’une sorte de droit subjectif et moral, son interprétation de la légalité de la loi vis à vis des droits fondamentaux est à géométrie variable. […]

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Depuis que le simple citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel pour vérifier la conformité d’anciennes lois avec la constitution — procédure dite « QPC » —, les vieux sages du Palais royal se convertissent en contrôleurs des travaux finis. C’est particulièrement le cas d’un long litige civil entre une société internet et le consortium du Stade de France, contrôlé par Vinci et Bouygues. L’avocat Roland Lienhardt (ci-dessus), résumé sa pensée dans une vidéo remontée par nos soins (toutes les audiences sont filmées — plus sexy qu’une décision du Conseil…) (suite…)

(CC) BySa La Quadrature du Net

(CC) BySa La Quadrature du Net

Fin de l’Acte 3 pour l’ignoble LOPPSI, qui est passée en 2ème lecture à l’Assemblée la semaine dernière (voilà le texte validé par les députés). Il y en a pour tous les goûts: le filtrage administratif du Net en zappant monsieur le juge, qui va même profiter aux trafiquants d’images pédophiles, maintien de l’article 32 ter-A sur la répression des habitats précaires, ainsi que toutes les autres dispositions relatives au vidéoflicage, aux fichiers policiers ou aux perquises électroniques (mouchards déposés sur les ordinateurs de suspects, à leur insu), sans oublier le dépistage obligatoire du VIH en cas d’agression sur un policier… Sans surprise, les députés membres de la CNIL ont voté pour le texte. Un nouvel article, le 30 ter, a été édulcoré au dernier moment: il visait à lancer des enquêtes de moralité sur des personnes qui usent de leur droit d’accès aux données publiques…

Curiosité: l’article 2 fait entrer l’«usurpation d’identité» dans le code pénal. De l’escroquerie aux atteintes à la réputation. Par ricochet, cela pourra aussi servir à coincer ceux qui changent d’adresse IP pour contourner la loi Hadopi… Mais pour laver la réputation d’une administration, outragée par un canular à la Yes Men, c’est pas encore au point… Retour sur l’affaire du faux repenti du 14 juillet qui remue de vieilles histoires entre la France et Haiti…

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Jusqu'ici n°2 (clic pour PDF)

Le dernier numéro du bulletin Jusqu’ici (n°2) nous rappelle à quel point les manifestants sont toujours de très bons cobayes pour tester de nouvelles armes de maintien de l’ordre.

Nous évoquions l’an dernier, aux Etats-Unis, les camions anti-émeutes et leurs canons acoustiques qui donnent la nausée, testés en Irak et à Gaza, puis employés à grande échelle lors du contre-sommet du G20 de Pittsburgh — comme lors du coup d’Etat au Honduras en septembre 2009. Ces armes sont appelées « non létales » ou, dans une novlangue plus douce, « à létalité réduite » . Après le pistolet à impulsion électrique et le flash-ball, trop has been, une autre petite merveille du maintien de l’ordre high-tech est expérimenté discrètement au gré des conflits sociaux depuis 2006. La France n’a pas encore de canons LRAD qui font gerber. Elle préfère les « grenades assourdissantes ». Des armes qui ne sont pas conçues pour tuer, mais qui peuvent mutiler sans fioritures. (suite…)

Villiers-sur-Marne, 2009 (arte.tv)

La question de la délinquance des jeunes fait à nouveau l’objet d’une vaste opération de com’ qui n’est pas sans rappeler la triste année 2005, qui se terminera par une série d’émeutes dans tout le pays. A cette époque, un député de l’UMP, Jacques-Alain Benisti, sortait de l’anonymat avec un rapport devenu fameux qui préconisait pour la première fois la « détection précoce » des enfants turbulents pour leur éviter la case prison dans leur adolescence. C’est cette même année que l’Inserm, l’institut public de recherche médicale, publiait une « revue d’études » sur la question, en prenant le partie de traiter la question là aussi sous l’angle « prédictif ».

Le 14 octobre 2010, le gouvernement organisait les premières « Assises de la prévention de la délinquance juvénile » (sic). Le 4 novembre,  Jean-Marie Bockel, le sous-ministre à la Justice, sortait un nième rapport sur la question. Comme par hasard, aujourd’hui même 10 novembre, Bockel doit faire mousser son « rapport » à Villiers sur Marne, fief de Bénisti… Pour régler la question « jeunes », les vieilles ritournelles prennent toujours le dessus. Voici quelques notes discordantes et deux documentaires à ne pas manquer.

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Me Aristide, en octobre devant le TGI de Pointe-à-Pitre (source UGTG)

C’est dans l’indifférence quasi-générale qu’une avocate guadeloupéenne, Sarah Aristide, a dénoncé, dans une lettre ouverte à Brice Hortefeux datée du 11 octobre, les pratiques inquisitrices et manifestement «illégales» de la Police aux frontières (PAF) de Guadeloupe. Pourtant, l’actualité est propice, en ce moment, à mettre son nez dans les fichiers policiers clandestins à visée ethnique — sorte de fichage au faciès.

Prenez par exemple le fichier « MENS » de la gendarmerie, visant à mots couverts les populations tsiganes et révélé par Le Monde et Rue89, preuves à l’appui. Un fichier qui n’a, bien sûr, jamais existé selon les autorités, non contredites par la CNIL. Prenez aussi cette autre base de données de la police des transports de la région PACA, révélée par le quotidien La Marseillaise, qui proposait de classer les contrevenants selon sept types de faciès ethniques. Dommage que les accusations de Me Aristide n’aient pas eu autant d’écho… Surtout que la PAF n’en est pas à son coup d’essai.  (suite…)

(source: aid97400.lautre.net)

[UPDATE 20/10] «Garde à vue à la française : ça sent le sapin…», comme l’a résume joyeusement le Syndicat de la magistrature le 14 octobre. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) venait de sanctionner la France pour les conditions peu démocratiques des gardes à vue. Et la Cour de Cassation, le 19 octobre, vient d’en rajouter une couche.

La CEDH, dans son arrêt Brusco c. France, dont la saisine date de juin 1999, énonce clairement (§45): «La Cour rappelle également que la personne placée en garde à vue a le droit d’être assistée d’un avocat dès le début de cette mesure ainsi que pendant les interrogatoires, et ce a fortiori lorsqu’elle n’a pas été informée par les autorités de son droit de se taire». Humiliation supplémentaire: pour condamner la France, la CEDH cite 3 arrêts précédents, impliquant… la Turquie, en 2008, 2009 et 2010. En mars dernier, la même CEDH, dans son arrêt dit « Medvedyev », avait épinglé la justice française sur la question du statut du parquet, dont la fausse indépendance vis à vis du pouvoir n’en faisait pas, mais pas du tout, une «autorité judiciaire» au sens propre du terme.
-> Lire l’arrêt complet de la CEDH du 14/10 et explication de texte (.pdf) de la CEDH. En juillet dernier, le Conseil constitutionnel avait déjà mis son grain de sel.
-> Lire le communiqué de la Cour de Cass’ sur les 3 arrêts du 19/10 sanctionnant les pratiques de la Chancellerie.
-> La « contre-circulaire » du SM, qui demande à ce que les dispositions s’appliquent maintenant (avant le délai fixé par la CC, 1er juillet 2011).

La surveillance sauvage des citoyens américains vient de passer un nouveau cap après un jugement de cour d’appel qui prend effet dans neuf Etats de l’union, dont la Californie. Évoquée par Time récemment, l’affaire se penchait sur un coup tordu de la DEA, la police fédérale antidrogue. Tout est parti d’une enquête des stups en 2007 — le but était de confondre Juan Pineda-Moreno, un cultivateur de marijuana de l’Oregon — qui s’est permis de pénétrer chez le suspect, sans aucun mandat, pour coller un module GPS sur sa Jeep. La cour d’appel a donc validé la violation de domicile pour justifier la surveillance électronique.

Une affaire exemplaire car elle réunit deux piliers de la doctrine sécuritaire étasunienne: « la guerre contre la terreur» — qui a produit les loirs iniques type Patriot Act qui ont élargi les pouvoirs d’enquêtes sans contrôle du juge — et «la guerre contre la drogue», qui a déjà produit son lot d’atteintes aux droits civiques depuis des décennies. (suite…)